LES MONDES NUMERIQUES

Blog des Masters en Sciences Sociales de l'Université Gustave Eiffel

L’utilisation du hashtag sur Twitter : Perception et Appropriation du hashtag


Par Madeline Tillmann, Harmony Langromme et Floraine Madigou

Introduction  

Les réseaux sociaux sont devenus parties intégrantes de notre vie quotidienne pour une grande majorité d’entre nous, en passant par les “digital natives” aux plus de 35 ans. Nous tchatons, nous publions et nous nous exprimons d’une façon différente d’un média social à un autre.

A l’origine, Twitter était relativement similaire à Facebook : un simple réseau social permettant de s’exprimer de manière quasi-libre -puisque Twitter a toujours été limité en nombre de caractères bien que celui-ci les ait augmenté-. Cependant, Twitter a pris une ampleur considérable dans le monde professionnel puisqu’avec l’arrivée du hashtag, il a pu proposer de nouvelles fonctionnalités en devenant un outil de veille utilisé par une grande majorité de veilleurs, de community managers et de chargées de communication dans le monde.

Depuis quelques années maintenant, nous sommes rentrés dans une ère où il devient primordial de savoir synthétiser au maximum son idée. Nous trouvons cette fonctionnalité à travers le microblogging de Twitter permettant de contraindre l’utilisateur à rédiger ce qu’il a envie mais de manière courte ses derniers temps. L’idée de Twitter a évolué en devant un outil de veille permettant de connaître en un minimum de mot le contexte c’est à dire ce qui a voulu être dit sans en lire des pages de texte.

De ce fait, nous nous sommes posées la question : De quelle façon les twittos (usagers de Twitter) perçoivent le hashtag et comment se l’approprient-ils sur la plateforme Twitter ?

Afin de répondre à cette problématique, nous débuterons notre dossier sur une présentation de Twitter et de tous ses termes sous jacents, puis nous rentrerons dans le vif du sujet avec l’utilisation du hashtag pour finir avec les risques qu’il peut engendrer.

I – Twitter

a. Le réseau Twitter et sa création

Le microblogging Twitter est un réseau créé en 2006 par Jack Dorsay et géré par l’entreprise Twitter Inc. Il permet de publier des tweets, à savoir de brefs messages sur Internet. A l’origine, Twitter a été réfléchi pour permettre aux utilisateurs appelés “tweetos” de raconter ce qu’ils font au moment où ils font (“What are you doing ?”) et d’échanger des informations (“What’s happening ?”). Cependant, aujourd’hui Twitter les invite à composer un nouveau tweet (“Compose new tweet…”). En somme, Twitter est une plateforme de réseau social permettant de relier et de fédérer des communautés de personnes au sens très large.

Il est possible pour chaque utilisateur de publier des messages susceptibles d’être lus et/ou repris (“retweetés) par tout autre utilisateur. Pour les tweets publics et non publics, ils peuvent être lus par n’importe qui ayant accès au réseau. Les membres de Twitter peuvent s’abonner à n’importe quel profil (professionnel, personnel, communautaire) et donc devenir des “followers” (suiveurs) de leurs publications. Dès lors, ils peuvent voir sur leur page d’accueil les messages postés par les personnes aux comptes desquelles ils sont abonnées.            

Le nombre de tweets sur ce microblogging ne fait que d’accroître, de jour en jour.

b. Les définitions tweets, hashtags

  • les tweets et hyperliens

Ces deux dernières années, un tweet est un message qui était composé de 280 caractères minimum et non plus de 140.

Selon Marie-Anne Paveau : “le tweet est une production plurisémiotique complexe, fortement contextualisée dans un écosystème techno discursif”. Reste-il qu’on peut distinguer deux formes de tweets.

La première forme est celle des tweets qui contiennent uniquement du texte rédigé de manière relativement conventionnelle, en respectant les normes de la langue écrite (Majuscule, ponctuation,caractères, alphanumérique) et qui sont à priori interprétables par tout à chacun.

D’autres, au contraire, sont formés d’éléments dits composites en rupture avec les règles d’écritures habituelles. Dans ce cas, le texte peut être réduit au dépend de symboles (+,&;->,>,=) et de formes courtes de messages laissant place à une écriture réduite pour tenir dans les 280 caractères réglementaires.

L’utilisateur peut utiliser des hyperliens dans son message et les placer n’importe où dans son tweet, offrant une grande liberté d’expression et une marque de fiabilité dans le message évoqué.

  • @ : l’arobase est couplé avec un nom de compte permettant de citer quelqu’un, renvoyer ses écrits, de l’interpeller, de dialoguer.
  • # : le hashtag est couplé avec un acronyme, un sigle, un mot ou une expression renvoyant à un fil précis et pouvant être le résultat d’une création utilitaire ou d’une création spontanée.
  • sigles : il en existe plusieurs permettant de renvoyer à une variété de fonctionnalités telle que : le “RT” pour retwetter, des textes et des contenus multimédias peuvent-être adjoint, le “DM” pour direct message, afin de parler en message privé à une personne, le “TL” pour TimeLine afin de suivre l’actualité de ses followers et bien plus encore..
  • les hashtags : mots clés

Le hashtag sur twitter a vu le jour en 2007 lorsque Chris Messina, utilisateur de Twitter, a proposé à Twitter d’utiliser le hashtag sur son réseau social afin de classer des publications par thèmes (mots) dans le but de suivre le fil d’actualité du sujet en question. En effet, les cofondateurs de Twitter ne s’étaient pas réjouit de l’idée puisque pour eux le hashtag était vu comme “un truc de geek”. C’est seulement plusieurs années après cet échange que Twitter s’est senti contraint d’utiliser le hashtag puisque d’autres applications l’utilisaient déjà.                Le hashtag est donc devenu officiellement un outil d’indexation des sujets de discussion et permettant de retrouver en un seul clic l’ensemble de publications sur un sujet précis.

Gabrielle, chef de projet digital à Orange, caractérise le hashtag comme un outil permettant à la fois de situer le contexte, d’indexer le contenu et de le lier tout en permettant une meilleure visibilité. Nous remarquons que le hashtag est donc un marqueur de métadonnées utilisé sur Internet permettant de marquer un contenu avec un mot-clé. En effet, le Journal Officiel le définit comme étant “une suite signifiante de caractères sans espace commençant par le signe # (dièse), qui signale un sujet d’intérêt et il est inséré dans un message par son rédacteur afin d’en faciliter le repérage” (JORF n°0019 du 23 janvier 2013). Autrement-dit, le hashtag permet à son utilisateur d’indexer ses publications, en insérant le dièse devant un mot ou un groupe de mots de son choix pour que Twitter considère sa publication non isolée mais faisant partie d’une thématique ou d’un sujet sur lequel parlent les twittos. De là, le hashtag inscrit le message dans un fil thématique. Si le twitto décide de mettre un ou plusieurs hashtags, son tweet sera indexé dans plusieurs fils d’informations à côté de tous ceux qui contiennent ce hashtag. Pour de nombreux enquêtés comme Gabrielle, cheffe de projet digital à Orange, le hashtag invite l’utilisateur à utiliser celui déjà existant afin de favoriser à un meilleur référencement.

c.  Twitter, un média social et un média d’actualité

Comme présenté en introduction, Twitter s’est modernisé en touchant aussi bien la sphère personnelle que la sphère privée. Il est donc passé d’un simple réseau social à un média d’actualité et plus précisément de veille. Les avantages relevés sur Twitter sont avant tout sa facilité d’utilisation et le partage de contenu court qui permet en très peu de temps, à la fois grâce au contenu et au hashtag, de comprendre le but du message. Contrairement à d’autres réseaux sociaux, Twitter endosse une information beaucoup plus pertinente puisqu’elle est sélective en fonction des mots clés que l’on désire.

Par ailleurs, Twitter est considéré comme un média de cristallisation politique notamment par la possibilité de fédérer une communauté virtuelle autour d’un hashtag. Le hashtag est perçu comme un mot-clé, une valeur ajoutée à l’argument du tweet permettant de se rendre visible. C’est une sorte d’accroche devenant une formule s’il devient viral. Par contre l’utilisation du hashtag a une valeur différente: il peut contenir de la subjectivité, une prise de position à un propos, à un mouvement, à une idée. Néanmoins, les enquêtés (⅚) utilisent le hashtag également sur le réseau social Instagram (le sixième n’étant pas sur ce réseau social). Tous, nous affirme que le hashtag sur Instagram est un élément descriptif de l’image, une continuité de la photo.

II – Le hashtag ou la “twittécriture”

a. Un style d’écriture à employer, propre à Twitter

“Quand j’ai créé Twitter, les téléphones portables les moins performants pouvaient composer des SMS de 160 signes, pas plus, car il fallait laisser un peu d’espace pour écrire les noms des utilisateurs. J’ai donc limité le texte à 140 caractères”, explique Jack Dorsey, interviewé par Paris Match dans un article paru sur le site le 11 avril 2012. La contrainte d’écriture est donc née de la technique.

Twitter serait “l’héritier de l’aphorisme”, formule littéraire désignant une phrase qui résume un principe en très peu de mots, et serait donc “l’enfant d’un mode de rédaction lié à une technologie, le télégraphe” (Marc Mentré, 2013). Plus généralement, Twitter se rapproche des SMS (Short Message Service). Les Twittos définissent leur style d’écriture comme “bref”, “laconique”, “tac-au-tac”. C’est un langage où il faut aller “droit au but”, et ce pour la même et unique raison : la limite de caractères imposée par Twitter. Les Twittos sont alors “forcés” de s’exprimer de manière courte, originale et percutante. Cette limite imposée par le réseau poussent certains à utiliser des abréviations mais beaucoup confient faire attention à leur orthographe, quitte à décomposer leur message en plusieurs tweets. Alexandre affirme que “tu peux être découragé du fait de la restriction du nombre de caractères” mais qu’il apprécie tout particulièrement Twitter car “il ne pratique presque pas la censure”.

“C’est un véritable exercice de style, réussir à être drôle ou à faire passer une information dans si peu de caractères. Sur Tweeter on a l’impression que les gens font ça spontanément, c’est super. On est sur un réseau social beaucoup moins prude que Facebook ou Instagram. Sur Twitter, on a un sentiment de liberté, tout peut être dit, tout peut être lu. Les personnes qui me font le plus rire sont sur Twitter.” (Alexandre)

Malgré tout, les abréviations et les erreurs sont monnaie courante et contribuent intrinsèquement à la construction de l’ethos de l’auteur du message. En effet, le style et le niveau de langage peuvent fournir des informations sur lui et donc induire chez le lecteur une adhésion ou un refus de lecture selon les affinités.  

b.  Placement du hashtag et “formule”

  • Un placement subjectif

Les enquêtes ainsi que les recherches menées semblent démontrer que la fonction d’origine du hashtag est d’indexer et indiquer le sujet/thème principal du message posté. Cependant, il peut également avoir de nombreuses autres fonctionnalités. Il peut s’agir d’un hashtag médiatif permettant d’indiquer la source d’information ou le type d’information véhiculée. Le plus souvent, il correspond à des titres d’émissions de télévision ou d’institutions. Cette mention permet alors de légitimer le contenu.

Le hashtag peut également désigner le destinataire du message, notamment quand celui-ci joue un rôle important dans le débat. Il peut être cadratif en indiquant où et quand se passe l’événement mentionné. Il peut être utilisé comme marqueur métalinguistique (#humour, #sérieux) afin d’éviter les erreurs d’interprétations par les internautes. Le hashtag peut servir à exprimer des émotions, des jugements ou des partis pris, à entretenir la polémique dans un débat..

D’un point de vue pragmatique, le hashtag a donc de nombreuses visées (Jackiewicz, Agnata & Vidak, Marko, 2014) :

• Informer d’un événement en temps réel ou le commenter en direct,

• Inscrire ses publications dans des thématiques de lecture,

• Transformer le thème de son message en “trending topic” (#TT),

• Recueillir des témoignages sur un sujet,

• Constituer une communauté d’intérêt, rechercher la connivence,

• Participer à des actions collectives,

• Construire son propre ethos, exprimer ses idées et ses positions personnelles,

• Dénoncer ou défendre un concept, une personnalité, une organisation.

Cette liste n’est bien évidemment pas fermée et certaines visées peuvent même être combinées simultanément. Lorsque les usagers de Twitter créent un hashtag, leur volonté est de créer un contenu interactif et pousser les autres utilisateurs à le reprendre dans leurs propres messages. Pour nos interviewés, l’un et l’autre en ont une utilisation très différente : Alexandre n’en crée pas car il ne tweete que très peu et considère le hashtag principalement comme un outil d’indexation lui permettant de faire converger les points de vue. Gabrielle elle, l’utilise pour donner une émotion à son Tweet, ou voir ce qui a été rattaché à un sujet donné. Pour elle, le hashtag permet réellement une meilleure visibilité car ils sont bien choisis, contrairement à Instagram où les hashtags sont utilisés bien souvent à tort et à travers, le nombre de caractères n’étant pas limité.

Le hashtag apparaît comme un outil polymorphe car sa forme linguistique n’est ni figée, ni prédéfinie, excepté le fait qu’il s’agisse d’une suite de caractères contigus précédée du symbole dièse. Il est important de noter que l’usage du hashtag n’est pas normé. Il fait partie du processus-même de rédaction. Les utilisateurs de Twitter choisissent de façon spontanée de marquer les éléments de leur discours à l’aide d’un hashtag. On parle alors d’un “étiquetage collaboratif” car il est librement utilisé par la communauté. D’un point de vue formel, le hashtag peut être placé à n’importe quel endroit du tweet. Les enquêtés répondent que le placement de leurs hashtags dépend de la situation/du message, mais qu’ils le placent généralement à la fin car “c’est généralement comme ça que cela se passe”. C’est un ordre logique de pensée afin de rattacher son opinion à un mot-clé, un mouvement ou une recherche, comme une sorte de conclusion ou d’accroche. Pour d’autres Twittos, le placement du hashtag est calculé, il dépend des mots, de leurs valeurs, de leurs tendances et de leurs significations. Lorsque le hashtag est adjoint à l’énoncé, à savoir exclu de sa structure syntaxique, on comprend qu’il peut devenir l’équivalent d’un marqueur d’index pour permettre la classification et le repérage ultérieur du message dans le fil thématique.

Il n’y a donc pas de règles pour placer le hashtag mais il a bien deux principales fonctions :

La première est que la présence du hashtag renforce l’impact potentiel du message en augmentant sa probabilité d’être retrouvé, lu ou retweeté (être retweeté étant le but de bon nombre de twittos). La deuxième fonction du hashtag est d’indiquer le thème du message. C’est un outil référentiel à un sujet qui facilite la recherche des tweets et rend possible la fonction d’affiliation autour de valeurs communes – positives ou négatives-.

  • La “formule”

Comme expliqué précédemment, ce qui pousse un internaute à ajouter un hashtag à son message est sa volonté de créer (ou reprendre) une formule reprise par le plus grand nombre afin de politiser, conscientiser, rire, s’exprimer. Le but est d’exceller en inventivité linguistique et créer un hashtag accrocheur, facile à retenir et de ce fait, à réutiliser.

Beaucoup font l’analogie entre le hashtag et une conclusion, une accroche, un slogan, une étiquette. Selon Alice Krieg-Plank, le hashtag porterait une “formule”. Elle définit les hashtags comme “un ensemble de formulations qui, du fait de leurs emplois à un moment donné et dans un espace public donné, cristallisent des enjeux politiques et sociaux que ces expressions contribuent dans le même temps à construire”. Dans ce sens, nous pouvons aisément reprendre l’exemple du slogan “Je suis Charlie”, très vite converti en hashtag : #JeSuisCharlie. D’autres formules sont nées sur Twitter comme #BalanceTonPorc, conséquence directe du scandale Weinstein aux Etats-Unis, qui a libéré la parole des femmes en France également. Mais comme nous pouvons le voir sur les images ci-dessous, ces formules deviennent tellement virales qu’elles sont bien souvent détournées.

Capture d’écran Google décembre 2018

Capture d’écran décembre 2018

Les formules d’origines sont parfois tellement virales et ancrées dans les usages discursifs sur Twitter qu’elles s’étendent à d’autres plateformes (même celles qui n’utilisent pas le hashtag comme Facebook) que le hashtag trouve même une résonnance dans les médias.

c. Le hashtag comme marque de subjectivité

Les nouvelles technologies ont contribué à l’essor des libertés fondamentales d’expression, d’opinions, et de conscience. En d’autres termes, les réseaux sociaux comme le microblogging Twitter donnent à chaque citoyen la capacité de s’exprimer, de s’associer, de participer, de contribuer, de critiquer, de se mobiliser. L’utilisateur peut en permanence, nuit et jour, 7j/7, donner son avis, envoyer des informations et interagir. Avec Twitter est né un nouvel espace de socialisation semi-privé et semi-public puisque dans les publications, nous donnons aussi bien notre avis sur une série que son avis politisé ou sa perception de tel événement ou telle personnalité.

Pour les enquêtés, il n’y a pas d’usage “approprié” du hashtag. “On peut l’utiliser pour tout”,    il n’y a pas de règles prédéfinies, cela dépend des volontés de l’auteur du tweet. Il est intéressant de voir une nette distinction qu’ils font entre leurs usages du hashtag avant et aujourd’hui. Certains l’utilisent beaucoup moins, ou en tout cas ne le mettent plus de façon systématique. Est-ce une question d’âge ? D’évolution de leur usage du réseau social ? Ou bien est-ce la perception du hashtag qui a changé, passant du mot-clé à “l’étiquette” ?

Nous pouvons nous demander pourquoi certains twittos publient leurs tweets sans hashtag afin de ne pas être retweeté ou obtenir des retours alors que leur message reste visible au public. La subjectivité et l’intersubjectivité répondent alors à la vocation de l’outil, destiné à dire aux autres, de façon spontanée, ce que l’on fait, pense et ressent. L’explosion de la liberté d’expression prédomine. Lorsqu’un utilisateur utilise un hashtag, il veut exposer son opinion et débattre autour, ou tout simplement rendre visible son message, sa pensée.

Il existe même une technique du “comment hashtaguer”, afin de trouver tous les hashtags propres à chaque domaine.

Cependant, il semble y avoir une règle tacite de ne pas mettre de hashtag de manière abusive parce que “c’est moche”, “c’est illisible”. Il ne faut pas créer un hashtag dans le vide, l’intérêt est qu’il soit viral, qu’il ait une grande portée, d’où l’importance de bien choisir ses hashtags. Les émissions par exemple ont parfois des hashtags qui leurs sont propres : #DALS pour Danse avec les stars, #ONPC pour On n’est pas couché, #TPMP pour Touche pas à mon poste,etc…La mission est de réutiliser des hashtags existants pour que les twittos puissent retrouver des tweets en lien avec l’émission grâce au hashtag. Il appartient donc aux comptes (personnels ou professionnels) d’avoir un usage stratégique du hashtag pour une meilleure résonance du tweet.

d. L’identité numérique : “de la visibilité médiatisée à la visibilité comme enjeu pour exister”

  • Définition

Chaque individu a désormais son histoire personnelle sur le Web, et donc une identité numérique. Sur Twitter, l’identité numérique d’un utilisateur se construit avec ce qu’il dit mais également avec ce que les autres disent de lui.

Blaise Lempen distingue quatre séries de traces de l’internaute sur la toile :

• Son identité connectée (liée à l’adresse IP de chaque ordinateur connecté à internet)

• Ses traces volontaires (commentaires et publications de photos, de textes, de vidéos…)

• Ses traces involontaires (ensemble de ses activités, de sa navigation sur Internet)

• Ses traces héritées (informations que les autres postent sur lui, comme des photos, des commentaires d’amis/de collègues/d’inconnus)

En somme, l’usage principal de Twitter consiste à partager des contenus autour de centres d’intérêts. La question de la visibilité est liée à l’image de soi virtuelle, qui a largement été traitée dans le domaine des sciences sociales, notamment la notion de la médiatisation de la visibilité.

  • Twitter et son hashtag, un outil de visibilité “phare”

La notion de médiatisation de la visibilité a été analysée comme donnant lieu à un élargissement du spectre de ce qui peut être vu et cela impacte la façon dont on se rend visible. Les internautes autorisent une forme intime de présentation de soi. Le hashtag participant à la visibilité, il peut donc être perçu comme une “étiquette” qui nous est associée. En utilisant un hashtag, on peut “vendre” aux autres une image de soi qui peut être différente de la réalité mais qui constitue bel et bien une identité virtuelle.

Selon Cardon (2008), Twitter est progressivement devenu un outil de visibilité “phare”. Les twittos donnent une forte visibilité à leurs centres d’intérêts et à leur production, débouchant sur la création de grands réseaux relationnels afin d’obtenir et de fidéliser une audience.

Certains twittos utilisent Twitter comme un défouloir. Contrairement à d’autres réseaux où il est possible d’exprimer ses émotions dans ses statuts (“J’adore”, “Wouah”, “Triste”, “Grrr” et même l’humeur du jour), Twitter semble offrir la possibilité d’être “sans filtre”, “plus honnête” que sur les autres réseaux. Nous pouvons évoquer le cas des influenceurs qui, lorsqu’ils se sont professionnalisés, ont fait du hashtag un outil de marketisation de leur image virtuelle. De nombreux articles existent même sur comment trouver et utiliser des hashtags pour obtenir des abonnés ciblés.

L’essor de Twitter semble induire une visibilité marquée à la fois par les DISTIC (dispositifs socio-techniques numériques de communication pour rechercher, transmettre, échanger, communiquer) et les normes de visibilité qui intègrent les changements des modes d’interaction et des procédures de présentation de soi. Aujourd’hui, les usagers veulent être vus. Les objectifs de visibilité diffèrent selon les profils. Cependant, Twitter ne contribue pas à entrainer de la réciprocité mais une hiérarchisation de l’information comme des locuteurs. Contrairement à Facebook qui met tous les “amis” dans un même groupe, Twitter valorise l’écart entre followers (comptes qui nous suivent) et following (comptes que nous suivons). L’influence se mesure alors à l’écart entre le nombre d’abonnés et d’abonnements. Les usagers vont plus facilement s’abonner à un compte qui comptabilise un nombre important d’abonnés. Par ailleurs, ce nombre traduit leur activité sur Twitter (s’ils tweetent beaucoup ou non), comme s’ils avaient pour responsabilité de nourrir leur compte.

  • Le hashtag, un instrument de remobilisation virtuelle autour d’un mot d’ordre

Par définition, les communautés virtuelles “sont des agrégats sociaux qui émergent du Net lorsqu’un nombre suffisant de personnes mènent des discussions publiques assez durables pour former des réseaux interpersonnels dans le cyberspace” (Rheingold, 1993). En d’autres termes, les communautés se distinguent par la possibilité d’échanger et celle de créer des valeurs pour chaque membre. Twitter est un instrument de remobilisation politique du citoyen autour d’un mot d’ordre. L’individu a la possibilité d’être plus actif voire innovant et créatif. C’est un outil qui donne du pouvoir à ceux qui n’en avaient pas. Il contribue, avec le hashtag, à élargir l’espace public à de nouveaux acteurs. Des twittos affirment que le but d’un hashtag est d’annoncer son opinion et de se rallier à une communauté politique, un mouvement solidaire, pour la plupart du temps spontané car relatif au contexte immédiat.

Ces communautés peuvent déboucher sur de forts investissements émotionnels. Ils sont favorisés par une proximité plus évidente, la communication est bidirectionnelle et interactive contrairement aux médias traditionnels. De plus, l’initiative de créer et rallier une communauté en ligne a montré de nombreuses fois que l’auto-communication sociale et politique augmente la possibilité d’arriver à un changement social. Par exemple, le hashtag #BalanceTonPorc lancée par la journaliste Sandra Müller a permit de mettre en lumière un problème sociétal sur les violences sexuelles faites aux femmes dans le milieu professionnel et d’avoir la possibilité de témoigner et de s’exprimer sans filtres. Autre exemple, le hashtag de ralliement #PorteOuverte a été lancé par le journaliste Sylvain Lapoix pour proposer un abris pour les personnes se trouvant dans la rue près des lieux des attaques du 13 novembre 2015. «Pour moi, #PorteOuverte a constitué un point de ralliement dans un paysage numérique de catastrophe. Je n’ai rien fait que créer une balise pour des usagers qui avaient déjà besoin d’aide ou en offraient mais ne se rencontraient pas». Le hashtag est devenu viral et a atteint près de 623 000 tweets. A l’échelle internationale, le hashtag #PrayForParis s’est imposé comme le plus diffusé de la planète avec près de 6,69 millions de tweets.

La force du hashtag peut sauver des vies, réconforter, donner le besoin de se rallier autour d’une cause. “On permet à des gens qui ne se connaissent pas, qui ne sont pas dans les mêmes réseaux de faire converger leurs opinions, leurs messages, de les rassembler. On rejoint un océan de plusieurs communautés qui communiquent à l’instant T”. Twitter abolit les distances et réduit les délais nécessaires pour mobiliser et lancer une action. C’est de l’instantané. En somme, le hashtag permet une affiliation digitale diffuse (Zappavigna, 2011) qui fédère des individus en communautés virtuelles allant jusqu’à se réunir autour de sujets souvents délicats.

III- Le risque des hashtag

Lorsqu’on a demandé aux Twittos interviewés quels sont les risques du hashtag sur Twitter selon eux, peu n’en voyaient pas, une partie a répondu directement à la question tandis que d’autres ont abordé les risques sur Twitter dans sa généralité.

a. Twitter est un espace ouvert qui peut nourrir des médias

Twitter, par extension Internet, exigent de la transparence s’appliquant à tous : toutes nos actions sont épiées, numérisées, stockées, analysées et suivies en temps réel.

     Les tweets et les hashtags publics sont aussi sur Internet. Le tweeto sait qu’il ne s’adresse pas seulement à son cercle d’amis ou de connaissances, mais au grand public. Chaque tweet semble être une page Internet avec sa propre adresse. Le risque ici, est le fait que les tweets soient publiés sur Internet et archivés par Twitter: cela est irrévocable. Dès sa publication, il échappe à son auteur et devient un objet quasi-éternel alors que l’auteur a rédigé son tweet dans un environnement qui incite à la pensée éphémère: c’est le flux de Twitter.

Pour illustrer cette idée, je vais prendre l’exemple de Gloire qui nous raconte qu’en 2015, il a  posté un tweet instantané sur la vie quotidienne de la plupart des jeunes étudiants qui a fait le buzz (3678 RT et 1573 de Likes, 19 commentaires).

Son tweet a intéressé Topito, un site web d’information réalisant des classements en tout genre comme le “Top 20 des tweets qui leur ont font rire cette semaine #83.” Topito est un site visité par des millions d’internautes :  2.35 millions de visiteurs uniques en février 2015.

Topito a donc envoyé un email à Gloire pour lui demander l’autorisation de publier son tweet dans un livre qu’ils allaient édité puis vendre, sans qu’il puisse bénéficié financièrement parlant de quoi que ce soit. Ce qui lui a pousser à refuser c’est le faible intérêt de publier son tweet dans un livre, et l’idée que cette société “se fasse de l’argent” sur son tweet alors qu’il perçoit Twitter comme un espace de création. Néanmoins son tweet fait quand même partie de leur site puisqu’il est à l’origine publique.

Un grand nombre de messages peuvent remonter du bas vers le haut de la pyramide digitale. Des médias peuvent se nourrir des informations fournies gratuitement par les internautes, comme Gloire, en épiant sur Twitter.

L’idée qu’une entreprise puisse bénéficier de l’imagination de personnes peuvent freiner certains. Pour d’autres, cela peut ressembler à une aubaine. Ici, le risque se combine également aux “traces volontaires et héritées” (Blaise Lempen, 2013) sur la toile.

b .Les “traces héritées” laissées sur le Web (Blaise Lempen, 2013)  peuvent être utilisées contre son gré   

Le deuxième risque proviendrait des “traces héritées” (Blaise Lempen, 2013) puisque les données personnelles, les photographies ou les informations peuvent être divulguées à l’insu de l’auteur et destinataire voire repris d’un réseau social et de partage à un autre . Cela peut surgir lorsqu’il y a un “clash” entre deux twittos. Notons que les clash sur Twitter sont monnaies courantes,  “être incendié gratuitement” est un risque évoqué maintes fois dans notre questionnaire ainsi que le “cyber harcèlement” par Alexandre.

Pour illustrer cette idée, Ingrid a subit un clash à propos d’une divergence d’opinions avec un inconnu sur l’affaire du #Tigre abattu à Paris le 24 novembre 2017. Ce dernier lui portait des propos diffamatoires par tweets et à continuer en direct message (DM), et ce jusqu’à reprendre une photographie d’une modèle au caractère sensuelle que Ingrid a photographié et publié sur Instagram. Il l’a légendé la photo en exprimant une haine et des insultes misogynes, alors qu’ils ne se connaissaient pas jusque-là. La cause : la divergence d’opinion.

D’après son histoire, il semble avoir une proximité que permet Twitter entre deux twittos car c’est un espace où le débat semble aller de soi. Les “traces volontaires” sont ici des “traces héritées” utilisées contre son gré, dans une démarche offensive. (Blaise Lempen, 2013).                                       

c. La surveillance

Camille, Shiva et Gloire ont fait allusion au fait que les tweets et HT peuvent faire du tort moral, et atteindre une réputation s’ils étaient mal employés et s’ils ont dit n’importe quoi puisqu’aujourd’hui, les employeurs viennent désormais chercher leurs renseignement sur Facebook, Google, Twitter avec refus d’embauche ou licenciement à la clé. C’est pourquoi il est primordiale que les internautes se responsabilisent pour leur intérêt professionnel. Les effets pervers peuvent émaner du contrôle ou de surveillance des institutions, des entreprises commerciales ou des citoyens qui sont susceptibles d’effectuer sur chaque utilisateur. Ils sont autant susceptibles de surveiller et punir que d’être eux-mêmes surveillés et punis.

Cette surveillance en découle sur la notion du design de soi (Dominique Cardon, 2008), que nous allons désormais expliciter.            

d. Le design de soi

  • Le désir d’extimité

Le désir d’extimité, par opposition à l’intimité renvoie à l’idée de la “simulation de soi” (Cordon, 2008), et donc les twittos peuvent endosser des rôles échappant à leurs univers quotidiens puisqu’ils peuvent styliser et modifier leurs apparences, leurs appartenances, leurs opinions, leurs activités jusqu’à menacer l’authenticité de leur personnalité réelle. Le risque étant de se créer un personnage sans se détacher complètement d’eux, en entretenant des liens incertains avec ce qu’ils sont réellement dans la vie de tous les jours. S’inventer des intérêts hors de son commun peut émaner d’une envie d’avoir une reconnaissance voire de plaire. Le risque est d’être victime de manipulation par les rôles endossés sur Twitter.

Camille : “Se perdre dans son identité numérique qui est différente de son identité réelle” Shiva : “Se noyer dans le personnage qu’on s’est crée, vivre à travers son arobase”

Madani: “Être dans une bulle”

Le mieux, serait de choisir et cibler sa visibilité et de ne pas confondre l’extimité avec l’exhibitionnisme et la visibilité.

  •   Le hashtag, une étiquette figée de soi

Plusieurs de mes enquêtés ont souligné le caractère “fixe” des “traces volontaires” (Blaise Lempen, 2013) -des tweets et des hashtags- comme étant le reflet de leur personnalité unique. En d’autres termes, l’impact des tweets dans sa globalité peuvent faire oublier aux lecteurs que l’auteur à plusieurs personnalités, plusieurs facettes plusieurs opinions. Le hashtag devient une “étiquette” auquel par défaut, les twittos pensent y être cantonnés. La viralité du hashtag peuvent pousser les membres de Twitter à réagir et à donner leur opinion d’adhésion à l’idée, mais se rendre compte au final qu’ils n’adhèrent pas avec ce mouvement. Le risque étant que les autres catégorisent les pensées et les opinions des auteurs, qui peuvent évoluer avec le temps.

@Ingrid: “On oublie que chacun a plusieurs personnalités, plusieurs opinions et le problème avec l’étiquetage du hashtag est que ça donne un effet fixe […] est-ce que ce hashtag va me poursuivre ?”

@Camille: “le HT peut être viral au début, mais au final tu vas comprendre que tu n’es pas forcément d’accord avec ce mouvement.”

Pour certains des twittos qui ont répondu au questionnaire et Gabrielle interviewée, le hashtag ne représente aucun risque, il reste un outil avant tout.

@Gabrielle : “ […] Après les personnes qui expriment leurs émotions et utilisent le hashtag comme une phrase, je ne trouve pas qu’il y ait un grand intérêt à part couper la sphère privée et publique.”

Comme dans la vie, les paroles s’envolent, les écrits restent. Cela appartient au twitto de choisir et de mouvoir ses positions, ses façons de pensées et ses activités. Le risque est d’en perdre le contrôle et de déplacer le curseur entre sphère privée et sphère publique.                                                

e. Propager des Fakes News

L’information multi-directionnelle peut représenter un risque selon nos enquêtés.       

En effet, sur Twitter chacun peut s’exprimer sur tout et n’importe quoi. Cette information prolifique n’est ni contrôlée, ni vérifiée. C’est en soi le rôle des journalistes professionnels de vérifier, confirmer l’information, la replacer dans son contexte, la décoder, décrypter l’information brute et canaliser les émotions. C’est pourquoi Camille affirme qu’il faut faire attention au trolling, aux personnes néfastes.

Alexandre, Madani et Thomas parlent du risque des rumeurs ou des Fake News qui peuvent se propager très rapidement sur Twitter, comme des mouvements sectaires qui peuvent propager impunément de la propagande à des milliers de personnes avec un discours de haine et inciter à la violence.

Quant à Gloire, il regrette ceux qui expriment des critiques “confortablement assis” contre ceux qui agissent vraiment dans le réel pour des causes comme humanitaires en parlant de la mobilisation faite par Omar Sy, entre autres, avec le hashtag #LoveArmy pour venir en aide aux Rohingyas, cette minorité musulmane qui fuit en masse une épuration ethnique en Birmanie.

Conclusion   

Cette enquête nous a permis de comprendre que Twitter est un microblogging qui a tiré son épingle du jeu grâce à la structure du site (message cours, le hashtag, des followers ) et grâce à son caractère informationnel qui émane de ce média social. Twitter se distingue par la contrainte du format d’écriture qui permet aux twittos d’écrire le flux de leurs pensées de manière laconique et concis précédé d’un hashtag. Généralement, le hashtag est présenté comme un moyen d’indexer le message sur un fil d’actualité sur le réseau Twitter mais on comprend que son fonctionnement ne se résume pas qu’à ça.

Il englobe un caractère libérateur puisqu’il peut être placé n’importe où dans le tweet, mais également un caractère figé puisqu’il est souvent perçu comme une étiquette collective autour d’un mouvement, d’une position, vis-à-vis duquel il faudrait prendre des précautions. En effet, il y a une technique du hashtag, un usage du hashtag, puisqu’il peut renfermé des valeurs personnelles (HT subjectifs) et des valeurs de communautés d’intérêts (HT viral).

Avec le hashtag, il s’agit aussi d’une question de visibilité et d’une construction d’une identité numérique puisque chaque utilisateur a désormais son histoire sur le Net. Selon les données recueillis, les twittos perçoivent le hashtag de manière impersonnelle lorsqu’il s’agit d’un HT viral qu’il inclut dans un tweet exprimant une opinion; et de manière personnelle en se l’emparant de manière très libre, pour en faire un outil polyvalent et un véritable support de créativité (usage plus rare chez les enquêtés).

Ce croisillon qui au départ n’était pas utilisé par une large communauté est devenue un marqueur de valeurs d’intérêts, un marqueur libératoire d’expression indexée sur Internet. Cette prise de conscience à demi-mesure est à interroger. L’on est généralement conscient qu’en nous connectant sur Internet nous laissons des traces, mais pourquoi continuons-nous, consciencieusement à vouloir être exhibitionniste, à différent degrés, aux écrans de la communauté virtuelle en sachant les risques que cela pourraient engendrer ?

Reste-t-il que Twitter semble être le réseau social considéré comme étant le plus sérieux pour celles et ceux qui recherchent l’actualité, partagent et débattent leur point de vue avec le monde virtuel. Néanmoins, le hashtag est encore peu exploré par des recherches puisque la communication numérique est en constante évolution. Il y a tout de même de plus en plus de travaux traitant sur les discours de Twitter constitués en corpus. Quant à notre démarche et notre  travail, nous espérons qu’il aide à mieux comprendre l’usage de jeunes francophones sur Twitter (petit panel aux profils variés) et de son hashtag et de mettre en lumière la représentation qu’ils se font du hashtag et comment ils se l’approprient sur Twitter en particulier.

  Annexes

Entretien avec Alexandre, un étudiant de 24 ans en 2ème année de Master CMW à l’UPEM

  1. Peux-tu te présenter ?

Je m’appelle Alexandre Festaz, j’ai 24 ans. Je suis étudiant en Master 2 CMW et je suis apprenti chez Orange en tant que chef de projet éditorial.

  1. Pourquoi utilises-tu Twitter ?

Je l’ai d’abord utilisé comme outil de veille quand je travaillais dans la presse, sinon je ne l’utilisais pas plus que ça. Maintenant, je l’utilise de manière personnelle mais je poste très rarement, je suis plutôt dans une position de “voyeur”.

  1. A qui t’abonnes-tu ?

Institutions (Elysée, Ministère de l’Intérieur…), presse, distributeurs, cinéma, ou alors des comptes semi-professionnels (imprimerie), artistes, des comptes lambda mais que je trouve très drôles. Je ne suis pas trop mes amis. Si je les suis, c’est généralement parce qu’ils se sont abonnés à mon compte, donc je m’abonne aux leurs en retour. Contrairement à Facebook ou Instagram, je n’utilise pas Twitter pour suivre des gens que je connais dans la vrais vie.

  1. Comment lis-tu un tweet avec un hashtag (lis-tu d’abord le contenu ou le hashtag et pourquoi ?)

Si le hashtag est intégré dans la phrase je le lis dans la continuité, tout dépend de sa position dans le tweet. Pour le travail cependant, je filtre les tweet grâce au hashtag, mais une fois que j’ai trouvé les tweets que je cherche, je lis seulement le message.  

  1. A quoi sert le hashtag, selon toi ?

C’est tout d’abord un outil d’indexation. On permet à des gens qui ne se connaissent pas, qui ne sont pas dans les mêmes réseaux de faire converger leurs opinions, leurs messages, de les rassembler. On rejoint un océan de plusieurs communautés qui communiquent à l’instant T.

  1. Utilises-tu systématiquement le hashtag ?

Je tweet très peu, donc je ne l’utilise pas. Je ne sais pas si ça me viendrait naturellement d’en mettre un. Si j’en utilise, c’est plus dans les SMS, de manière drôle pour me moquer de quelque chose avec un hashtag à rallonge. Mais si je tweet sérieusement, je ne pense pas que je mettrais un hashtag. Sauf si c’est pour un phénomène important, je pense au #MeToo, dans ce cas oui je l’utiliserais.

  1. Comment perçois-tu le hashtag ?

Un hashtag permet de créer des catégorisations qui vont être plus ou moins éphémères. Le hashtag c’est un peu le gyrophare qui va dire “Eh, ici il y a peut-être un message qui pourrait vous intéresser, venez-voir”.

  1. Comment t’appropries-tu le hashtag ?

Je ne sais pas si j’arriverais à créer un hashtag, à moins que ce soit quelque chose de drôle. C’est compliqué parce que finalement, tu reprends un hashtag qui est repris par plein de personnes donc qui est hyper impersonnel mais qui est utilisé souvent pour raconter des choses très personnelles (il évoque les professeurs qui ont lancé le hashtag #PasDeVague, suit à l’agression d’une professeure par l’un de ses élèves). Ce n’est pas le hashtag en soit qui est personnalisable, c’est ce qui va autour, c’est ce qui l’accompagne.

  1. Quels sont les risques/conséquences du hashtag ?

Faire des hashtags tellement longs qu’on n’arrive même plus à les lire (rires). Plus sérieusement, je pense au cyberharcèlement, à la propagation des fake news, aux personnes qui utilisent des hashtags simplement pour être remontées dans les tendances. Certains utilisent le hashtag comme tremplin pour leurs propres idées, même s’il ‘a rien à voir avec leur message. Le hashtag a un double tranchant : ça permet à plein de gens de se faire entendre mais ça permet à d’autre de faire passer des messages qui n’ont rien à voir.

  1. Trouves-tu que Twitter se distingue des autres réseaux sociaux ? Si oui, comment ?

Oui, carrément. Déjà dans la forme (même si le nombre de caractères a augmenté, on reste limités). C’est un véritable exercice de style, réussir à être drôle ou à faire passer une information dans si peu de caractères. C’est peut-être aussi pour ça que je ne tweetais pas avant. Sur Tweeter on a l’impression que les gens font ça spontanément, c’est super. Sur Twitter, il y a aussi un véritable esprit de communauté, même si on peut parfois aller très loin. Des gens se disputent sur un sujet et vont dévier sur un autre complètement différent. Ce que j’aime bien c’est qu’il n’y a quasiment pas de censure, on est sur un réseau social beaucoup moins prude que Facebook ou Instagram. Sur Twitter, on a un sentiment de liberté, tout peut être dit, tout peut être lu. Les personnes qui me font le plus rire sont sur Twitter.

  1. Est-ce que tu écris de la même manière sur Twitter que sur un autre réseau social ?

Sur la plupart des réseaux sociaux, je ne contribue pas énormément. Mais sur Twitter il faut être direct, concis, il faut aller droit au but. Quand un tweet se décline en 3 tweet, tu n’as plus envie de le lire. Sur Twitter, on est impatients. Il y a une consommation du tweet qui va très vite.*

  1. Quels réseaux sociaux utilises-tu ?

Facebook, Twitter, Instagram, Youtube.

Entretien avec Gabrielle, chef de projet chez Orange

  1. Peux-tu te présenter ?

Je suis diplômée en communication dont ma spécialité était centré sur l’innovation. J’étais en alternance chez Orange. Mon 1er poste était en tant que community manager pour le département Wenity au sein d’Orange pour valoriser l’égalité H&F. J’étais en charge du compte twitter. J’ai été également volontaire dans un réseau qui s’appelle les Etableurs qui permet aux salariés de se former au digital à travers différents ateliers. J’ai animé des ateliers dont celui pour apprendre à utiliser Twitter et Linkedin de manière professionnelle. Je suis à la suite devenue chef de projet digital des Etableurs pour animer son compte Plazza (réseau social interne d’Orange) et son compte Twitter. Et dans quelques jours, je vais devenir responsable clientèle donc arrêter toutes mes activités avec les réseaux sociaux.

  1. Pourquoi utilises-tu Twitter ?

Je l’utilise comme outil de veille. Dans mes activités professionnelles, j’utilise twitter pour communiquer en externe c’est à dire que je me soucie davantage des personnes non salariés.

J’utilise Twitter car j’apprécie son côté instantané, sa facilité d’utilisation (commentaire, photos, hashtag), partage de contenu court (moins de prise de position comme LinkedIn).

J’ai donc deux comptes celui de Gabrielle et celui des Etableurs.

  1. A qui t’abonnes-tu ?

Pour les Etableurs, je m’abonne aux salariés d’Orange car j’ai pu remarquer que certains salariés n’utilisaient pas Plazza mais plutôt Twitter.

Je m’abonne à des personnes s’intéressant au même sujet que les miens comme le domaine du digital, rh…) et je suis également des comptes médias (journaux, entreprise) et des influenceurs. Pour ma sphère perso, je l’utilise comme outil de veille pour suivre des sujets qui me passionnent comme les musées, la peinture.

  1. Comment lis-tu un tweet avec un hashtag (lis-tu d’abord le contenu ou le hashtag et pourquoi ?)

Ca dépend, je commence par lire le contenu généralement puis le hashtag qui va m’éclairer sur le contexte du contenu.

Par exemple, si le contenu est une vidéo, une photo ou un texte, le hashtag va me permettre de comprendre dans quel contexte il a été publié. Quand, je scrolle, c’est le contenu qui m’interpelle.

Quand je cherche à avoir des informations sur un sujet, j’utilise le hashtag

  1. A quoi sert le hashtag, selon toi ?

Dans un tweet, le hashtag situe le contexte (événement…), indexe le contenu (référencement) et de lier son contenu avec d’autres postes.

Par exemple, de manière basique, je suis un événement, des personnes prennent la parole, pour se joindre à la conversation, celles-ci doivent utiliser le hashtag. Il permet donc d’inviter les autres à reprendre le hashtag.

Le hashtag permet par définition une meilleure visibilité. Il enrichit le contenu contrairement à Instagram.

  1. Utilises-tu systématiquement le hashtag ?

Je l’utilise assez fréquemment, ça donne une émotion, ça permet de faire passer un message assez simple, c’est comme un sommaire.

Quand je clique sur le hashtag Etableurs, je vois tous les contenus ayant utilisés ce hashtag par exemple  “en direct sur l’atelier Twitter pour l’utiliser comme outils perso” # collaboration #partage

  1. Comment perçois-tu le hashtag ?

C’est un outil utile pour donner du contexte, faire passer une émotion, indexer un contenu. Si on sort de twitter, c’est surtout un outil de marque (génération jeune) et selon moi ça n’a pas de sens.

  1. Comment t’appropries-tu le hashtag ?

Je crée rarement un hashtag. Je réutilise des hashtags utilisés par des personnes que je suis afin que mon contenu soit visible par celles intéressées.

Par exemple, pour le compte des Etableurs, je vais regarder le type de hashtag et quelles sont les tweets utiliser par Orange dans les domaines qui m’intéressent c’est à dire dans le digital et le rh ( pour avoir de la cohérence dans le sujet) puis je les réutilise…

Si je crée un hashtag pour me distinguer, par exemple “etableurday”, celui-ci va être repris par les autres utilisateurs pour l’indexer cet événement.

  1. Comment tu te sens lorsque les autres interagissent par rapport à tes tweets et hashtag ?

Je me sens seule si je n’ai aucun retour alors j’essaye de comprendre ou était le problème et s’il y avait vraiment un intérêt à communiquer.

Dans un point de vue professionnel, c’est toujours une gratification et une valorisation de recevoir un like, un com, ou qu’il soit re-publié.

Pour la journée des Etableurs, j’ai publié une photo de groupe avec un petit contenu et des hashtag afin que les personnes puissent retweeter derrière et donc confirmer la réception de cet envoi.

  1. Quels sont les risques/conséquences du hashtag ?

Le hashtag est un outil parmi d’autre, donc pour moi il n’y a pas de risque. Après les personnes qui expriment leurs émotions et utilisent le hashtag comme une phrase, je ne trouve pas qu’il y ait un grand intérêt à part coupé la sphère privée et publique.

BIBLIOGRAPHIE

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  • Marie-Anne Paveau. Genre de discours et technologie discursive. Tweet, twittécriture et twittlitterature. 2012. <hal-00824817>
  • Thompson John B., Pasquier Dominique, Relieu Marc. Transformation de la visibilité. In: Réseaux, volume 18, n°100, 2000. Communiquer à l’ère des réseaux. pp. 187-2, http://www.persee.fr/doc/reso_0751-7971_2000_num_18_100_2218

WEBOGRAPHIE

Journal officiel de la République Française  (éléments de définition du hashtag) : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000026972451

Paris Match, interview Jack Dorsey : http://www.parismatch.com/Actu/International/Twitter-Jack-Dorsey-le-

revolutionnaire-le-plus-sage-du-monde-156486)

Télérama : article sur #PrayForParis (http://www.telerama.fr/medias/les-attentats-de-paris-ont-affole-les-

compteurs-sur-google-et-twitter,134479.php, 20/11/2015).

Définition d’un tweet :

Wikipédia, définition Humanités Numériques :

https://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Humanit%C3%A9s_num%C3%A9riques&oldid=143327297

10 choses à savoir sur le hashtag :

#PasDeVague, le hashtag utilisé par les enseignants pour témoigner des violences au quotidien (BFM TV) :

https://www.bfmtv.com/mediaplayer/video/pasdevague-le-hashtag-utilise-par-les-enseignants-pour-temoigner-des-violences-au-quotidien-1110919.html

Hashtags : bonnes pratiques et pièges à éviter :

https://business.twitter.com/fr/blog/the-dos-and-donts-of-hashtags.html

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